Quand simplicité rime avec plaisir
En ces périodes de fêtes où le prestige en bouteilles rejoint si facilement nos tables de réveillons, j’éprouve un plaisir non dissimulé à partager avec vous en toute simplicité la dégustation de deux cuvées gourmandes, extrêmement conviviales et faciles d’accès, dans le sens noble du terme, vinifiées en mono-cépage. Elles portent la signature « Les Jamelles » d’un couple de passionnés, Catherine et Laurent Delaunay, fondateurs de la maison Badet Clément & Co, créée en Bourgogne en 1995 et aujourd’hui solidement implantée en Languedoc.
De la Côte bourguignonne au cœur du Languedoc, l’histoire d’une passion partagée devenue métier
Issus de deux familles bourguignonnes présentes dans le vin depuis plusieurs générations, Laurent Catherine Delaunay avaient à cœur de poursuivre l’activité historique de leurs familles respectives, raison pour laquelle ils se sont mis en projet dans le monde du vin, en débutant par une activité de négoce qui leur a progressivement inspiré l’envie de rencontrer le terroir de manière plus concrète. En Bourgogne bien sûr mais aussi au cœur du Languedoc, où leurs activités prennent de plus en plus d’ampleur. Ils ont alors opté pour des partenariats avec des viticulteurs et caves qui s’inscrivaient dans l’esprit qualitatif de leur démarche, tout en développant leur activité de distribution de domaines indépendants et de création de marques propres. Une évolution encore plus marquante fut mise en place en 2015, avec l’acquisition de vignobles languedociens et d’une importante cuverie dans les Corbières. Le rapprochement du terroir se poursuit donc avec de belles ambitions pour l’avenir et un ancrage plus appuyé dans l’agriculture biologique.
« Les Jamelles », marque fondatrice de la maison Badet Clément
Les deux cuvées dégustées dont ce billet fait l’objet appartiennent à la marque « Les Jamelles », considérée comme la ligne fondatrice de la maison. Plus de vingt cépages cultivés en Languedoc y trouvent leur place, au sein de six gammes différentes, vinifiées en vins blancs tranquilles, rouges ou effervescents, ces derniers adoptant selon les cas la méthode traditionnelle ou la méthode Charmat. L’objectif des Jamelles est de présenter un visage le plus fidèle possible des différentes variétés cultivées dans le sud, tout en offrant le plaisir d’un accès facile et d’un bel équilibre entre chaleur méridionale et fraîcheur d’arômes.
La dégustation
Chardonnay – Les Jamelles – IGP Pays d’Oc 2015 – 13% Vol
Habillé d’une jolie robe paille à doré intense, lumineuse et limpide, ce vin brille par un éclat qui invite à la dégustation.
Le nez se montre expressif et franc dès l’ouverture, livrant d’emblée de généreuses notes de fruits mûrs (pêche, poire) associées à une touche florale charmeuse (lilas, violette), que rejoint un registre de petits fruits secs bien présent (amande, noisette légèrement grillée). Engageant et charmeur.
L’attaque confirme rapidement la maturité du bouquet par une sensation onctueuse et enveloppante. On y apprécie les saveurs d’agrumes et de fruits blancs mûrs (citron, pamplemousse, poire), rafraîchies par un support d’acidité bien dosé. L’équilibre vivacité/moelleux est présent en milieu de bouche, illustré par une texture onctueuse mais sans lourdeur. Une sensation d’harmonie et de fondu (note beurrée) enveloppe une finale agréablement persistante, associant les fruits secs et une subtile touche minérale salivante. Un vin qui, à défaut de présenter une grande profondeur, a le mérite de faire preuve de franchise et générosité, dans une certaine complexité aromatique et de présenter une typicité variétale appréciable. N’est-ce pas d’ailleurs l’objectif prioritaire de cette cuvée ?
En accompagnement du repas, j’imagine des cuisses de grenouilles, une volaille de Bresse à la crème ou même une andouillette grillée à la moutarde. En version aquatique, une truite aux amandes ou des poissons de rivière légèrement crémés devraient convenir.
Syrah – Les Jamelles – IGP Pays d’oc 2015 – 12,5% Vol
Présentation assez intense pour cette robe grenat à nuances pourpres, au disque ouvert et à reflets encore légèrement bleutés.
Les baies noires sauvages (cassis, sureau, mûre) et de figue bien mûre se livrent de concert, mêlées aux épices et à une touche d’encre, de chocolat et de cuir frais.
Cette cuvée présente en bouche une syrah civilisée et consensuelle, dotée d’un bel équilibre d’ensemble et livrant sans attendre une jolie tension par sa fraîcheur acidulée, la maturité du fruit se révélant ensuite davantage.
La densité se présente dans un style digeste, tonique et aérien. Ce vin épuré est porté par des tanins fins et gourmands, déjà presque lissés. Une vigueur naturelle maîtrisée par une vinification sage et respectueuse du fruit en quelque sorte… On y retrouve l’empreinte d’une macération carbonique partielle par l’exubérance des saveurs de petites baies rouges et noires. En finale, on apprécie la délicieuse amertume rafraîchissante de la réglisse et une touche poivrée typique. Un vin croquant, épuré, de belle typicité variétale et de plaisir immédiat, pouvant toutefois encore se conserver 1 à 3 ans, même si sa vitalité et son énergie s’apprécient dès aujourd’hui.
A table, je le dégusterais dès aujourd’hui, sur une entrecôte grillée, des charcuteries, une daube provençale ou catalane, un gigot d’agneau ou encore une terrine de gibier.
Tentative de conclusion
Si la dégustation de ces deux cépages cette fois représentés par des vins friands et conviviaux ne m’empêchera pas d’aller fureter dans ma cave pour y dénicher les flacons qui y sommeillent dans l’attente de nos agapes festives, c’est sans bouder mon plaisir que j’ai découvert cette gamme de vins accessibles par deux de ses représentants, somme toute assez fidèles à leur typicité variétale.
Alors bien sûr, il se trouvera toujours quelques esprits chagrins qui ergoteront sur la difficulté de produire des vins à personnalité affirmée avec des surfaces aussi vastes (158 hectares pour l’ensemble des marques) et un tel volume de production (15,6 millions de cols par an)… Je préfère pour ma part souligner la réussite entrepreneuriale d’une société dont l’objectif est de conserver des valeurs humaines bien ancrées, qui a su créer de l’emploi et qui affiche aujourd’hui de réelles ambitions environnementales, tout en s’équipant d’installations modernes de vinification.
Rien de comparable, c’est vrai, avec la démarche et l’esprit de travail que beaucoup apprécient dans les domaines familiaux de taille sensiblement plus modeste, qui sont légion dans les différentes appellations de la région. C’est bien sûr dans ces propriétés-là que nous aimons découvrir les vins de niche qui nous emportent, dignes reflets d’un travail souvent artisanal, la plupart du temps qualitatif bien qu’il serait naïf de prétendre que c’est toujours le cas. Deux mondes se côtoient finalement sans trop de soucis et seuls les esprits enfermés dans des schémas réducteurs se montrent insensibles à la valeur ajoutée que peuvent représenter des structures plus imposantes pour une région aussi vaste que le Languedoc.
J’ai vraiment apprécié le chardonnay pour son authenticité. Il me plaît d’imaginer qu’il représente avec justesse la réunion des racines bourguignonnes de ses créateurs et leur passion pour les terroirs des terrasses languedociennes. Même si la syrah est présentée comme une réussite emblématique de la gamme, mes attentes vis-à-vis de ce cépage – qui fait partie de mes favoris – sont malgré tout entrées en confrontation avec le style gourmand et peut-être un peu trop rassembleur d’une cuvée très consensuelle. Cela m’inspire concrètement l’envie de faire davantage connaissance avec les vins encore plus ambitieux de la maison, représentés par la marque « Abbotts & Delaunay », ne fût-ce que pour vérifier s’ils tiennent leur rang au milieu des cuvées à forte personnalité de terroir que j’apprécie tant chez mes amis vignerons languedociens. L’histoire est loin de son épilogue ; n’est-ce pas là son plus bel intérêt ?
Lumineuses fêtes de Noël à toutes et tous !
Q.
Pour en savoir davantage à propos de cette gamme, c’est ici...
Pour mieux connaître l’ensemble de l’activité de la maison Badet Clément & Co, c’est par là…
Vous etes un beau et surtout tres habile parleur. Dangereux pour les gens qui aiment a boire du vin sans s’y connaitre.
Vous auriez pu vendre tout aussi bien n’importe quelle autre denree.
Pour un vjgneron retraite dont les produits ont « subjugue » les degustateurs du guide de la RVF, selon leurs dires, c’est pas tres interessant.
Bonjour,
J’ignore le fondement de votre jugement mais il repose sur une absence totale d’argument. Lorsque j’écris sur les vins que je déguste, c’est librement et nullement mandaté par qui que ce soit. Personne n’est encouragé à rejoindre mon opinion, qui n’est qu’un partage de ressenti, ce qui semble vous avoir échappé.
Par ailleurs, il me semble utile de vous préciser qu’aucun lien commercial ne me lie avec les producteurs des vins que je déguste.
Enfin, l’exemple de la RVF que vous mettez en avant me semble très mal choisi, dans la mesure où cette revue, autrefois qualitative, a depuis plusieurs années versé dans le publi-commercial largement diffusé et ne se cache plus d’intégrer à ses diffusions des offres commerciales qui ne laissent planer que peu de doutes sur les relations entretenues avec certains domaines et châteaux.